L’Ecologiste et les peuples premiers

Partager sur : TwitterFacebook

l_couv_27Le dernier numéro de L’Ecologiste (n°27) a consacré son dossier aux peuples premiers, « une vision du monde pour aujourd’hui ». Vous avez bien lu : les peuples premiers devraient être une source d’inspiration ou la voie à suivre pour notre société actuelle. C’est d’ailleurs l’occasion de célébrer Teddy Goldsmith, fondateur de L’Ecologiste, dont « toute l’œuvre, selon les rédacteurs de la revue, est inspirée par les sociétés traditionnelles ». Il est vrai que depuis au moins quarante ans, Teddy Goldsmith a présenté les peuples premiers comme un modèle à suivre. Certes il reconnaît qu’il « serait utopique de prétendre adopter le mode de vie d’une société (…) comme celle de nos ancêtres qui vivaient de la chasse et de la cueillette ». Toutefois, ajoute-t-il, « il serait intellectuellement malhonnête de ne pas reconnaître que selon des critères écologiques, et de fait biologiques et sociaux également, tel est l’idéal ».

 

Un contrôle social plus efficace basé sur la peur

Alors pourquoi une telle fascination pour ces peuples premiers ? La première raison est, bien évidemment, que ces sociétés vivraient davantage en harmonie avec la nature et que leur mode vie aurait un impact sur la biosphère bien moindre que le mode vie de la société industrielle. Mais il existe, pour Teddy Goldsmith, une raison plus profonde : la recherche de la stabilité sociale. Ou dit de façon plus crue : comment contrôler de façon efficace le comportement des individus. Comme il l’expliquait déjà en 1972, dans Changer ou disparaître, la structure communautaire serait plus adaptée pour faire accepter les contraintes imposées par les limites écologistes : « Dans une société hétérogène et centralisée comme la nôtre, les contraintes de la stabilisation, pour être efficaces, apparaîtraient comme des mesures de coercition extérieure. » Goldsmith préfère ainsi les communautés réduites, car le contrôle social peut y être plus fort : « Ayant pris conscience des limites de l’état stationnaire, chacun serait libre, dans ces limites, d’organiser sa vie à sa guise ; les contraintes seraient alors acceptées comme nécessaire et souhaitables, et non comme des mesures répressives imposées par un gouvernement lointain et sans visage. » Plus tard, il se plaindra en effet que « dans une grande ville, les gens sont largement à l’abri de l’opinion publique. Ils font ce qu’ils veulent. » En revanche, pour lui, « seule l’opinion publique reflétant les valeurs traditionnelles, alimenté par «le potin méchant» est capable de maintenir l’ordre publique. » Chez les sociétés premières, la pression sociale est en effet très forte, car elle s’exerce avec la religion et la peur de sanctions – le tabou. Comme l’explique Goldsmith, « un tabou est une interdiction très importante et si on ne l’accepte pas, si on n’obéit pas à cette interdiction, si on la viole, on est soumis à d’épouvantables pénalités. Et donc les gens avaient peur de le faire. » En d’autres termes, la société préconisée par Teddy Goldsmith est une société dont les membres agissent en fonction de la peur d’une sanction d’ordre divin.

Eliminer les comportements qui menacent la stabilité

Pour arriver à la société stable tant souhaitée par Teddy Goldsmith, il faut éliminer tout ce qui pourrait perturber « l’ordre de la nature ». Chez les peuples premiers, affirme Goldsmith, toute action qui ne respecterait pas la nature doit être considérée comme une « violation de l’ordre général de l’univers », avec en conséquence des sanctions à la mesure de cette faute. L’un des agissements humains les plus perturbateurs pour la biosphère est, selon l’écologiste franco-britannique, la croissance démographique. Ceci n’est pas une surprise, car c’est une des principales obsessions de Goldsmith. Ce dernier explique : « Pour maintenir l’ordre spécifique du cosmos, c’est-à-dire la hiérarchie du cosmos, il faut naturellement éviter de gâcher, de surexploiter, les ressources naturelles de notre planète. Ceci exige avant toute autre chose d’appliquer un certain contrôle démographique, parce que la démographie actuelle est hors de contrôle. » Or, poursuit-il, « seules les sociétés primitives (…) étaient capables de contrôler leur population. Et ce n’était pas par des lois appliquées par l’Etat ou par des agences internationales, c’étaient des lois appliquées par la religion ». Il précise que « c’était la peur de sanctions «surnaturelle» (…) qui permettait aux gens de contrôler leur population ». Autrement dit, si l’on fait trop d’enfants, on sera punis par les dieux et les esprits. Cette punition, dans les sociétés primitives, consistait souvent à tuer les nouveaux-nés « excédentaires ». Goldsmith reconnaît que « l’infanticide a joué un rôle important » et considère « qu’aussi barbare que cette coutume puisse sembler être, cela révèle un sens profond des responsabilités envers sa femme, sa famille et sa communauté, (sens) qui est absent aujourd’hui. »
Autres graves menaces à la stabilité, ce sont tous les comportements qui induisent un changement ou une innovation. Goldsmith loue les sociétés premières car « la préoccupation principale (de leurs) citoyens, c’est d’observer la loi traditionnelle et de s’écarter aussi peu que possible de la norme culturelle. Tout concourt à cette fin, étant donné que toutes les déviations sont fortement désapprouvées par l’opinion publique, proscrites par le conseil des anciens et, selon leur croyance, punies par les esprits ancestraux. » Restez donc bien sages dans la « norme culturelle », sinon gare ! D’ailleurs, Goldsmith reproche à notre système d’éducation – quelle horreur ! – de « récompenser l’innovation et l’originalité, c’est-à-dire qu’il est conçu pour l’instabilité plutôt que la stabilité ».

Eliminer les individus qui menacent la stabilité ?

Pour préserver la stabilité de la société, il semble qu’éliminer certains comportements ne suffise pas et qu’il faille également supprimer certains individus… et pas seulement les nouveaux-nés « excédentaires » comme on l’a vu plus haut. Teddy Goldsmith prend l’exemple des Igbos du Nigeria, pour lesquels «les déviations qui perturbent l’ordre naturel sont appelées aru, littéralement abominations», le mot aru signifiant aussi « crime contre la nature ». Parmi ces crimes contre la nature, les Igbos considèrent « un certain nombre d’actes non naturels ». Goldsmith en cite plusieurs dont… la naissance de jumeaux ! C’est pour cette raison que pendant longtemps les Igbos tuaient les jumeaux à la naissance ! Il est évident que Teddy Goldsmith avait connaissance de cette pratique, mais il a préféré la passer sous silence, sans doute pour ne pas trop écorner l’image idyllique qu’il donne des peuples primitifs… Toutefois, Teddy Goldsmith n’hésite pas à affirmer qu’au nom de la « hiérarchie du cosmos », il faudrait laisser Mère Nature supprimer certains individus perturbateurs. Il s’est notamment interrogé sur le sort de ce qu’il appelle les « génétiquement et culturellement inadaptés ». Il explique en effet que « c’est précisément parce qu’il n’y a pas de nécessité environnementale pour les mutants, les accidents ou les réponses aléatoires qu’ils ont tendance à être éliminés. » Il reconnaît néanmoins que « l’application de ce principe au sein d’une société ou d’une population peut nous apparaître désagréable. Nous avons tendance à la considérer comme une discrimination contre le génétiquement et culturellement inadapté ». Mais il n’y aurait pas d’autres alternatives et, selon lui, encourager ces « inadaptés » est « de loin plus immoral que d’accepter le principe de base selon lequel l’homme est soumis à la sélection comme toutes les autres formes de vie ». Teddy Goldsmith se fait alors menaçant : « Les mesures qui tendent à empêcher l’opération de la sélection en choyant les inadaptés, c’est-à-dire par le biais de l’Etat providence, vont obligatoirement réduire dans les mêmes proportions la stabilité sociale en accroissant l’entropie ou le caractère aléatoire. Si nous décidons de prendre (les inadaptés), alors nous devons être préparés à en payer le coût. »

Sources
« La saga méconnue des frères Goldsmith (2ème partie) », Agriculture & Environnement, n°61, juillet-août 2008.
Changer ou disparaître, équipe de The Ecologist sous la direction d’Edouard Goldsmith, Fayard, 1972.
Le Tao de l’écologie, E. Goldsmith, Le Rocher, 2002.
Entretien avec François Ozon, 25 novembre 1994.
Discours de Teddy Goldsmith, Forum écologie et spiritualité des 2, 3 et 4 octobre 2004.
Edward Goldsmith, « La société écologique », Cadmos, n°5, printemps 1979.
Edward Goldsmith, « Adam and Eve revisited », The Ecologist, sept. 1973.
Edward Goldsmith, « Education – what for ? », The Ecologist, jan. 1974.

61 commentaires sur “L’Ecologiste et les peuples premiers

  1. @ rageous

    C’est vrai, vos amis amateurs de l’ordre et de la préférence nationale n’ont pas que des mauvaises idées : du temps de Mussolini les trains arrivaient à l’heure.

    Allez un tuyau : ME51 et daniel ne rentrent pas dans la catégorie des pauvres gens avec lesquels compatit si spontanément l’anthropologue de supérette Laurent Berthod (quand ils ne font pas partie de France Telecom, parce que là c’est pas pareil, c’est des feignants de fonctionnaires).

    Au cas où vous n’auriez pas remarqué, ME51 et daniel sont bien loin de chialer « que la souffrance sociale les aient menés là ». Au contraire ils en sont fiers. Ils se laissent juste aller, qui à sa haine d’un énigmatique « péril vert », qui à sa haine des gamins de banlieue qui envahissent sa station de montagne.

  2. @zygomar
    « Vous êtes l’archétype de l’imbécile heureux imbu de lui-même, du pauvre type frustré qui ne connait comme mode de discussion que l’invective, le mépris et l’insulte, du beauf sans arguments. »

    Cette description vous convient à merveille ainsi qu’à vos amis!!!
    Vous n’avez que les insultes pour arguments!!! Relisez attentivement El Gringo « l’homme des Lumières » selon ME51. C’est révélateur de votre état d’esprit.

  3. @ José.B et Luc fait rire

    En fait vous formez un beau couple et vous vous complètez parfaitement bien, un peu comme l’arrière train d’un bovin,il y a un qui lève la queue et l’autre qui laisse tomber la bouse.

  4. Tiens, ce coup-là aucune réponse encore, alors que d’habitude ils dégainent le colt assez rapidement ! Ils doivent avoir la queue basse !

  5. Laurent Berthod toutes mes excuses pour cette réponse tardive.

    @ME51
    On comprend mieux l’origine de toute la bouse que l’on trouve dans vos propos. Vous avouez implicitement que votre plaisir préféré de bon paysan facho c’est de lécher le cul des vaches!!!

    @Laurent Berthod
    Il semble que votre culture se limite à la perversité liée à votre queue!!!
    On peut en déduire que lors de vos partouzes bovines avec ME51 vous ne demandez pas le consentement de ces pauvres betes avant de leur faire subir l’outrage fasciSSte!!!

    Avec toutes mes excuses encore pour cette réponse tardive!!!

  6. Post 2 Thierry Jaccaud dit: « cela pourrait être très intéressant d’avoir une discussion sur le fond ». Avec des accolytes du niveau de José.B et de Luc fait rire, l’objectif est atteint, ils raclent le fond depuis leurs premières interventions!

  7. Laurent Berthod grands pieds:
    Encore un effort et vous serez aussi ordurier que votre compère Quel-âne-borgne (l’inoubliable auteur de « Luc Ferry vous encule »).

    Rajout :
    Quant à la discussion sur le fion, ça fait longtemps qu’elle est sur la table mais que l’intéressé fait des moulinets pour ne pas y répondre sous prétexte que je ne suis pas le bon interlocuteur. Pas grave, je mets ma question dans le domaine public :

    comment se fait-il que Laurent Berthod arrive à concilier sans schizophrénie sa défense d’un monde rural en souffrance et la fière revendication de son pèlerinage hebdomadaire chez Leclerc sous prétexte que l’éclairage y est agréable ?

    Quant à la discussion sur le FN, on a bien fait le tour, mais curieusement vous vous défendez les uns les autres en prenant bien soin d’ignorer vos différences pour ne retenir que le plus petit dénominateur commun : une haine crasse de tout ce qui peut sentir l’écolo et qui à vos yeux justifie de voter pour un ancien tortionnaire raciste 100 fois plus riche que vous.

    Ciao les cloportes.

  8. « comment se fait-il que Laurent Berthod arrive à concilier sans schizophrénie sa défense d’un monde rural en souffrance et la fière revendication de son pèlerinage hebdomadaire chez Leclerc sous prétexte que l’éclairage y est agréable ? »

    En écrivant cela Luc-ne-fait-rire-que-lui est d’une mauvaise foi insondable, qui est évidente à la lecture de ce que j’ai écrit. C’est la méthode habituelle de ce sinistre individu, déformer ce que disent ses interlocuteurs, se cacher, usurper l’identité d’autres intervenants, rien que des méthodes très recommandables, si on aime l’odeur des déjections.

  9. @ José B., Luc fait rire et consort:

    Vous posez la question de savoir se que sont de « erreurs, d’errements ou d’accidents de l’évolution. »

    Il n’est nul besoin d’aller très loin pour avoir la réponse.
    L’évolution est basée sur deux moteurs:
    1) Les erreurs de copies de l’ADN (ou de l’ARN pour les rétro-virus). Ces erreurs induisent les mutations (délétères, avantageuses ou neutres).
    2) La reproduction sexuée. Elle assure le brassage des gènes, et génère aussi des accidents : translocations de chromosomes, doublement ou pertes de gènes, polyploïdie etc.

    Elles sont là les « erreurs, les errements »…
    Il est facile de comprendre que la sur-évolution peut être source de nuisance pour l’espèce porteuse. Il en est ainsi pour l’Edelweiss. La surévolution de son inflorescence la rend très sensible aux perturbations de son milieux, et inféodée au vent pour sa pollinisation.
    Pour les Ophrys, c’est la même chose. La sur-évolution du label (pétale inférieur) les rend tributaires de l’espèce butineuse (bourdon, araignée, mouche…). Cette sur-évolution est une impasse évolutive, un « errement » puisque la plante ne peux que continuer dans cette fuite en avant. Un des principe de l’évolution est que le retour en arrière est impossible.
    Un autre exemple est donnée par la lignée des ammonites. Apparues au Dévonien, elles ont disparues au crétacé supérieur. Mais leur évolution finale montre un retour de forme ancestrale (déroulées, spires non collées, droite…). Leur lignées avaient atteint une point évolutif « limite ». Il est apparu alors des formes « biscornues », « bizarre », ne correspondants pas aux formes de la lignées évolutives depuis 300 millions d’années. Cette sur-évolution c’est accompagnée d’une chute importante du nombre d’espèce et du nombre d’individu (visible dans les fossiles). Il est clair que la sur-évolution a été une des causes de leur disparition (après 310 millions d’années de règne sur les océans), car moins adaptées ou plus sensibles…

    Les accidents de l’évolution sont connus sous le jargon paléontologiste-évolutionniste de « phénomènes de contingence ». C’est à dire des phénomènes extérieurs à l’évolution elle-même, mais qui vont modifier radicalement le chemin évolutif.
    Le plus connu est la crise crétacé-tertiaire qui a vu la disparition des grands reptiles et l’avènement des mammifères.
    Un autre était la crise permo-triasique, qui a laminée les reptiles mammaliens (ancêtre des mammifères) et permis l’essor des dinosauriens.
    Une autre bien plus ancienne est la crise d’Ediacara, qui a éliminé une grande partie de la faune du moment (principalement des arthropodes) et ainsi sélectionnée les protochordés (comme le pikaia).
    Enfin que dire des grandes glaciations (depuis l’archéen) qui façonnées et modifiées largement les traits environnementaux et donc orientées l’évolution.

    @ tous:
    Il ne sert à rien d’être aussi vulgaire et insultant. Les uns envers les autres. Débattre c’est porter des arguments , pas des insultes….
    C’est mon avis.

    @ Luc fait rire :
    Vous revenez encore sur mon post sur les suicides chez FT.
    Soit, alors regardons les vrais chiffres:
    Nombre de suicide dans la population active: 16 / 100 000 / an.
    Nombre de suicide chez FT: 14 / 100 000 / an
    Nombre de suicide chez les agriculteurs en 2009 : 60 / 100 000

    Donc il n’y a pas de « vague de suicide » chez FT, cette une histoire montée en épingle par les syndicats pour faire revenir l’état sur la privatisation.
    Il y a près de 4 fois plus de suicide chez les agriculteurs que dans la population active…
    Alors ou est la vague de suicide????
    Les agents de FT ont-ils vraiment de bonnes raisons professionnelles de se suicider (à la différence des agri, policier, infirmières, professeurs???)?

  10. Qui a commencé à semer des odeurs nauséabondes ? Souvenez-vous, mon cher ami !
    Après quoi on a du mal à se retenir de dire vertement que ça pue.

Les commentaires sont fermés.