La député Martine Billard quitte les verts : analyse

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«J’ai décidé de démissionner aujourd’hui d’une organisation dont le projet n’a plus que de lointains rapports avec celui auquel j’ai adhéré il y a seize ans», a annoncé la députée verte de Paris, Martine Billard. Celle-ci désapprouve la ligne défendue par Daniel Cohn-Bendit et la direction nationale des Verts, qu’elle juge centriste. Et déplore l’émergence de Génération Ecologie «qui est de droite». Or, Martine Billard se définie comme «écologiste et de gauche». Sur son blog, elle écrit (1) :

« (…) parce que l’urgence est de plus en plus grande, je ne peux me résoudre à une simple gestion environnementale du système, toute positive qu’elle soit, sans que cela ne s’articule à un projet global clair. Pour affronter la crise actuelle – économique, sociale, démocratique et écologique -, il faut apporter des réponses qui ne se contentent pas de changements à la marge. Les Verts n’ont plus cette audace : d’un parti pour la transformation de la société, ils sont devenus un parti d’accompagnement. »

De gauche. Elle a donc décidé de se rapprocher du Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon, espérant participer à la fondation d’un «Parti de gauche écologiste». Et amène avec elle Paul Ariès, «objecteur de croissance» et directeur du journal Le Sarkophage.

Se félicitant de cette «enthousiasmante» et «formidable nouvelle», Jean-Luc Mélenchon reste à convaincre : «nous ne les accueillons pas comme les porteurs d’une vérité révélée devant laquelle nous nous écroulerions béats d’admiration». L’écologisme ambiant relevant la plupart du temps de la croyance irrationnelle, on attend avec impatience la suite des événements. Le fondateur du Parti de gauche souhaite produire «un métal, une matière nouvelle» et «faire ce qui est le cœur du projet du Parti de gauche, un parti creuset». Pas écolo pour deux sous, la métaphore productiviste en bandoulière, Jean-Luc Mélenchon a l’air de s’y connaître en recyclage des métaux… Il peut néanmoins se réjouir de voir rejoindre son parti celle qui se déclarait il y a six mois encore « dubitative » sur son engagement écologique. Et qui avait refusé d’être tête de liste du Front de gauche dans le Sud-Est (une élue, Marie-Christine Vergiat, avec 5,9% des suffrages…).

Décroissance.
Selon le journal Libération (9/7/09), Martine Billard serait aussi « agacée par l’antiproductivisme du parti écolo » et de ses supporters opulents et sourds aux « réalités du monde du travail ». En tous les cas, son départ des Verts réjouit le journaliste Olivier Bonnet qui dénonce (2) sur son blog « l’imposture de l’écologie à la Cohn-Bendit » et cite l’écolo-journaliste au Monde Hervé Kempf : « Pour sauver la planète, sortez du capitalisme ».
Lachée.
Martine Billard voyait sa circonscription (la 1ère à Paris) menacée par le redécoupage électoral projeté par le secrétaire d’Etat chargé des collectivités locales Alain Marleix. Sur son blog, elle ne décolérait pas (3) contre ce qu’il faut bien appeler du « gerrymandering » :
« Si la circonscription explose, ce n’est pas ainsi ni par manque de cohérence territoriale, ni par nombre d’habitants insuffisant, mais parce que l’UMP désespère de la gagner. » Selon les échos que nous obtenons difficilement, le 4e arrondissement serait collé en un étrange V à des quartiers du 11e (extraits de la circonscription de Patrick Bloche, PS), tandis que le 1er et le 2e rejoindraient le 9e et un morceau du 8e, garantissant une circonscription bien à droite pour Pierre Lellouche (UMP). Pour finir, le 3e serait adjoint au 10e arrondissement. Or, il est possible de maintenir la 1ère circonscription en lui adjoignant si nécessaire un ou deux quartiers du Sud du 9e arrondissement pour être dans la moyenne du nombre d’habitants des futures circonscriptions. »
Les conclusions de la Commission Balladur qui envisagent ce redécoupage et le dépècement de la 1ère circonscription avaient été encensées par les Verts. Martine Billard s’était même demandé si « les Verts [avaient] perdu la tête » après avoir appris que la secrétaire nationale, Cécile Duflot, avait reçu (4) Edouard Balladur pour saluer les « progrès » des propositions de réforme des collectivités territoriales.
« Il est illusoire de penser que les Verts tiendront la plume de la loi annoncée pour l’automne (…). N’en déplaise à la direction des Verts, je n’oublie ni qui est Nicolas Sarkozy, ni ce que fait l’actuelle majorité UMP à laquelle répond le rapport Balladur. Jamais je ne servirai de caution écologiste à Nicolas Sarkozy » déclarait alors Martine Billard.
Sa circonscription rayée de la carte (électorale), elle avait peu de chance d’être réélue député de Paris en 2012. En arrivant au Parti de gauche, peu implanté dans la capitale, elle n’avait donc plus grand-chose à perdre. Et surtout pas la cohérence d’un engagement à gauche de la gauche et assumé.

(1) http://www.martinebillard-blog.org/index.php?2009/07/08/346-pourquoi-je-demissionne-des-verts
(2) http://www.plumedepresse.com/spip.php?article1171
(3) http://www.martinebillard-blog.org/index.php?2009/06/18/333-redecoupage-electoral-m-marleix-s-obstine
(4) http://www.leparisien.fr/liveafp-politique/reforme-territoriale-balladur-chez-les-verts-01-04-2009-463235.php

Le blog de Martine Billard : http://www.martinebillard-blog.org/