Mortalité d’abeilles : coup de gueule d’un apiculteur professionnel contre la propagande

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Suite à cet article de Sud Ouest décrivant une « hécatombe dans les ruches d’abeilles », le célèbre Guy Waksman (si, si !) dans sa lettre hebdomadaire agricole très suivie donne quelques précisions sur le cas de deux apicultrices en question :
« Certains apiculteurs de Charente ont fait état de mortalités anormales. La mauvaise gestion de la lutte anti varroa est de toute évidence la cause de ces mortalités. Pour les deux apicultrices de Charente qui ont suscité la réaction de M. Breuil, il faut savoir que
– elles ont refusé la visite du GDSA (Groupement de Défense Sanitaire Apicole), sans doute parce qu’elles n’ont pas que des bonnes pratiques,
– elles n’ont pas suivi les procédures de déclaration d’incident, préférant en appeler directement à l’opinion publique via les medias (presse, télé
). »

Et de rapporter ensuite le coup de gueule d’un apiculteur. Extrait :
-« En dépit du caractère majeur que représente la lutte contre la varroase dans la pratique sanitaire apicole, celle-ci est fréquemment négligée pour des raisons économiques ou par manque de connaissance générale sur le sujet. »
-« Si ces gens représentent les professionnels j’ai honte d’en faire partie… Nous, nous sommes persévérants, patients et tenaces. Nous savons nous remettre en cause, réadapter notre discours et trouver des compromis même temporaires avec nos divers partenaires pour exister ensemble dans la banalité du quotidien du monde agricole. »
« Et pour finir, c’est la faute aux autres, ces Dames sont bien sûr hors cause : ce n’est pas moi, c’est l’autre. Vous pensez peut être que allons pleurer Mesdames ?, NON. Un apiculteur digne de ce nom qui perd 50% de ses ruches en hiver a toujours le même nombre de colonies à la sortie de l’hiver, voire même un peu plus. Ces apiculteurs qui produisent plus de 85 % du miel français sont des apiculteurs professionnels, pas des pleurnicheurs. Ils font avec et ont la parade pour conserver le même nombre de ruches chaque hiver : c’est onéreux mais ils le font. Pour 2016, combien voulez-vous d’essaims et en prime des abeilles françaises, pas d’importation ? »

14 commentaires sur “Mortalité d’abeilles : coup de gueule d’un apiculteur professionnel contre la propagande

    1. J’aime bien la démonstration, on teste une hypothèse, c’est pas celle là, c’est forcément l’autre, mais on ne fait pas d’autres analyses pour en être certain. C’est facile la science… Étrange aussi que seule deux apicultrices soient touchés, pas de chance…

      1. Votre remarque me fait penser à :

        Raymond Boudon, « L’origine des croyances bizarres », article de la revue « Commentaire », N° 149/Printemps 2015, p. 194-195.

        Je cite :

        « John Stuart Mill veut que la pensée ordinaire soit victime de sophismes. Elle accepte facilement le principe erroné dit de « l’affirmation du conséquent ». Il se formule ainsi : « si une hypothèse implique qu’on observe tel événement et si l’on observe effectivement l’événement, c’est que l’hypothèse est avérée ».
        […]

        Il poursuit – et je ne résiste pas au plaisir de vous en faire partager in extenso le plaisir de la lecture de cet extrait ! 😉
        « Dans « Les Femmes savantes », Bélise pratique, elle aussi, le sophisme de l’affirmation du conséquent lorsqu’elle cherche à se convaincre qu’elle fait fondre ses prétendants, bien qu’ils ne se soient en aucune façon déclarés. En « femme savante » qui se respecte, elle est convaincue que les sentiments doivent rester silencieux. Le fait que ses prétendants supposés ne se déclarent pas est donc à ses yeux preuve de leur amour :

         » Il m’ont su révérer si fort jusqu’à ce jour
        qu’ils ne m’ont jamais dit un mot de leur amour.  » » 😛

    2. Le produit s’utilise après floraison, stade G2, donc l’an dernier impossible que les abeilles aient butinée de la vigne traité, d’autant plus que c’était la première année d’utilisation.

    3. Le journaliste a fait fort :

      « Dans un courrier adressé aux professionnels, l’Union nationale de l’apiculture française (Unaf) avance une théorie. Celle de l’utilisation massive l’an dernier d’un insecticide, le Luzindon, employé pour combattre la cicadelle de la flavescence dorée.

      Les risques qu’il présente pour les abeilles et les pollinisateurs ont été démontrés. Ce pesticide à base de thiaméthoxam « est un néonicotinoïde dont la très forte toxicité à l’égard des abeilles est reconnue », affirme l’Unaf. D’autant que le timing colle parfaitement. Le Luzidon n’a été autorisé qu’en 2013. »

      Premier paragraphe : « théorie »

      Deuxième paragraphe « « risques … démontrés ».

    1. Foutage de gueule, c’est pas une étude, c’est une sorte de grosse review qui n’apporte rien. On en revient aux bases: aucune étude ne montre un lien clair entre usage de néonict et réduction de la biodiversité ou augmentation de la mortalité des abeilles à milieu constant.

      C’est pour ça que l’annexe du rapport censé démontrer le lien entre néonic et les pertes de biodiversité est une farandole de « may » « could » « suggest ». Aucune observation directe, que des suppositions croisant des données de labo et de modèles douteux.

      Ce machine me fait penser aux recommandations alimentaires officielles, 40 ans de « could » « may », des centaines de millions de malades, mais ont continue par que c’est politiquement difficile d’admettre qu’on se trompe depuis si longtemps.

  1. Merci Karg pour la lecture- commentée- de cette étude .

    Les personnes n’ont averti et qui surtout ne savent pas lire l’anglais , ont conclurent que les néonicotinoides sont effectivement dangereux pour les abeilles !!!

    Merci la France Agricole pour balancer de telles conneries , surtout que paraît il que Xavier Beulin fait parti de ses actionnaires !!!

    1. On peut se demander si le rapport de l’EASAC n’est pas une oeuvre de commande, destinée à perpétuer la « suspension » de certains usages de trois néonics, voire de l’étendre.

      http://www.academies.fi/wp-content/uploads/2015/04/Easac_15_ES_web_Complete.pdf

      http://www.easac.eu/home/press-releases/detail-view/article/neonicotinoi.html

      Du résumé (la seule chose qui sera lue) :

      « 1. There is an increasing body of evidence that the widespread prophylactic use of neonicotinoids has severe negative effects on non-target organisms that provide ecosystem services including pollination and natural pest control. »

      Du texte (page 21) :

      «  Effects on other pollinators and organisms that contribute to natural pest control and soil functioning have rarely been addressed (as seen by the large difference in available literature between these sectors in the WIA literature reviews). The effect that neonicotinoids might have on constraints to the restoration of biodiversity on farmland (one of the priorities of European agricultural policy) has been completely neglected. Annex 4 has sought to remedy these shortcomings as far as the available data allow. »

      C’est certes dans le contexte réglementaire, mais c’est une admission de la faiblesse de la littérature sur les espèces sauvages.

      Page 44 :

      « Up to now, it has not yet been established that concentrations in normal field conditions are having significant impacts at the honey bee colony level. »

      Les politiques seront ils sensibles à :

      « As the EASAC report acknowledges, all pesticides involve a balancing act between the desired effect on food production and the inevitable risk of collateral damage to non-target species and the environment. In the case of the neonicotinoids, the increase in scientific knowledge over the last two years suggests that the current balance requires reassessment. » ?

      C’est du communiqué de presse… et l’aspect « équilibre » ne figure pas dans le résumé.

      Il faut aussi revenir sur le sophisme du « increasing body of evidence », de l’accumulation croissante de preuves (enfin, preuves…). Ben oui !

      Si vous faites de la recherche, une part importante, sinon majeure, de votre activité consiste à chercher… des financements. Il faut donc proposer des sujets, voire des résultats, qui rendent la recherche – pas la scientifique, la financière – fructueuse. C’est un peu pareil pour la publication. Donc sus aux néonics…

      Enfin je ne vais pas trop m’éterniser sur le sujet. Il y a des chercheurs qui ont le doigt sur la gâchette de la plainte en diffamation. N’est-ce pas A.-E., vous qui avez trouvé sage de retirer un billet ?

      1. May:98 occurrences (il faut enlever le moi de May, mais il en reste quand même une blinde)
        Could: 26 occurrences
        Suggestion:21 occurrences
        Might: 2 occurrences
        Can: 103 occurrences

  2. Bon indépendamment de cela, l’application de thiametoxam en pulvérisation dans des vignes qui aujourd’hui sont pour une partie sous enherbement maitrisé, c’est limite si au sein des herbes qui couvrent le sol certaines sont en fleur et attirent les abeilles.

    On a fait tout un foin pour le traitement des semences pour lequel le risque était somme toute, très, très, très limité, le mot nul n’existant pas, thiametoxam en pulvérisation pendant l’été, sur des cultures en partie enherbées, même fauchées , c’est plus risqué.

    Cela dit hurler contre le thiametoxam du luzindon et ne rien dire du spinosad au moins aussi toxique, fait rigoler.

    J’oubliais , le spinosad est un produit naturel et un des rares insecticide autorisé en agriculture biologique qui soit efficace.

    Il n’en tue pas moins gaillardement les abeilles, mais cela l’UNAF oublie de le signaler.

    Autre point, citation :  » L’Unaf incite donc les apiculteurs français à distribuer un courrier explicatif aux viticulteurs, aux caves coopératives ou tout autre organisme viticole. Elle encourage à utiliser des « solutions moins toxiques » comme le Klartan, « d’une efficacité satisfaisante, moins nocif que le Luzindon ». Si le Klartan reste un insecticide, son utilisation à la tombée de la nuit, en dehors de la présence des abeilles, respectera l’écosystème. »

    Certes, certes mais la faune nocturne en terme d’insecte est au moins aussi importante que la faune diurne, certes pas les pollinisateurs hyménoptères mais il n’y a pas que les hyménoptères qui pollinisent les plantes, et au sein des hyménoptères certains comme les hyménoptères sauvages n’ont aucun gout pour les pollens de colza ou de tournesol, encore moins le miellat de pucerons, dont raffolent seules les abeilles domestiques.

    On remarquera que les apiculteurs n’auraient rien contre le klartan de jour, sur les cultures en fleurs vis à vis des abeilles, normal vu les doses qu’ils mettent dans les ruches dès fois que pour les ruches aussi ce soit de nuit.

  3. L’article du journal sud ouest mentionne bien « jachères présentes entre les pieds de vignes », ce qui est en fait un enherbement maitrisé, moyen de limiter l’usage d’herbicides et d’éviter l’érosion du sol, très positif pour l’environnement mais incompatible avec l’utilisation d’insecticides toxiques pour les abeilles si une fraction de la flore composant cet « enherbement » est en fleur et attractive pour ces insectes.

    C’est typiquement le type de situation explosive pour observer des accidents pour nos chers pollinisateurs. Il faudrait vérifier si l’étiquette du produit excluait ces vignes enherbées de son usage ou du moins contre indiquait son emploi. Dans ce cas il ne suffit pas de traiter la nuit à supposer que cela ait du sens dans la pratique, la durée d’exposition au thiametoxam pour une application foliaire dépassant largement les 24 heures.

    C’est tout le paradoxe entre deux mesures de bon sens :
    – l’enherbement maitrisé qui sauf pour les vigne en risque de stress hydrique ( vignes âgées bien implantées) est une bonne méthode de gestion des mauvaises herbes, du risque d’érosion et du risque de transfert des pesticides dans l’eau ( les pesticides se dégradent sur les bonnes « mauvaises herbes » parfois semées , atteignent peu le sol et migrent faiblement vers les ruisseaux).

    – l’enherbement maitrisé va abriter des espèces qui en fleurissant vont attirer les abeilles et les exposer aux insecticides. Ces derniers doivent alors être non ou peu toxiques ( klartan…) ou répulsifs. Faute de quoi il faudrait appliquer des « inhibiteurs » de floraison pour dicotylédones sur l’enherbement avant les plages de traitement insecticides pour éviter l’attraction des abeilles ou bien ajouter des répulsifs pour les abeilles à la bouillie insecticide ( différents pyrèthres ou pyrethrinoïdes ont cet effet)

    1. Je n’ai pas cherché – vous êtes un puits de science qui viendra à mon secours – mais il me semble que le thiamethoxam est très rapidement dégradé à la lumière.

      Quelle est l’importance de la flore exploitée par les abeilles sous les vignes.

      Où sont placées les ruches de ces deux dames ?

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