Dans La France Agricole du 8 juin, Pierre Chevalier, un agriculteur de Charente, revient sur les mutations très importantes vécues par le monde agricole au XXe siècle et sur les conséquences de celles-ci. Si « cette évolution (…) rapide a sans doute été la cause d’erreurs », « je suis fier des résultats obtenus » : « La mission qui était confiée à l’agriculture était que la France soit au moins autosuffisante pour les produits agroalimentaires. Le seul reproche que l’on puisse nous faire est d’avoir trop bien réussi puisque nous sommes dans le Top 5 de l’agriculture mondiale. »
Et Pierre Chevalier de mettre les pieds dans le plat : « Pourquoi refuser à une catégorie sociale d’évoluer au même rythme que le reste de la population ? » Accepter ces changements ne fait pas des agriculteurs français des « Big Farmers » : « Rassurez-vous, je ne roule toujours pas en ‘4×4 pick-up’ et je consulte mon ordinateur une fois par jour pour la météo et le solde de mon compte. »
Il revient ensuite, avec force ironie, sur la vie rêvée des agriculteurs dans le passé, un fantasme d’urbains, vous allez le voir :
« Avez-vous eu la chance, comme moi, de faire la traite de vos vaches laitières à la main en recevant avec plaisir la queue de Blanchette sur le visage en guise de Chanel n°5 ? C’est beaucoup moins cher et tout aussi persistant. Ah, c’était bien mieux que le robot de traite, comme vous le pensez sans doute, et j’allais oublier la corvée de l’enlèvement du fumier à la brouette ! Pour les foins, quel plaisir de faire des meules de foin en vrac et de les défaire le lendemain s’il avait plu dans la nuit. De même, on se régalait en entrant ce même fourrage dans une grange surchauffée lorsqu’on approchait de la toiture. Ah ! C’était le bon temps.
Voici venu le temps des moissons : sans parler de la poussière et de la chaleur, la corvée de monter des sacs de blé sur une échelle menant à un grenier était un vrai bonheur.
Pour protéger les vignes du mildiou et de l’oïdium, une randonnée dans les allées avec 30 kg sur le dos procurait une joie intense : il faudrait ajouter le plaisir immense, dos couché sous un soleil de plomb, de passer la binette pour éliminer le liseron et autres plantes envahissantes. Certes, les vendanges étaient l’occasion de faire la gerbaude à la fin de celles-ci. Elle était bien méritée après avoir coupé des kilos de raisins, les avoir transportés à dos d’homme dans une hotte avec 3 kg de terre à chaque pied lorsqu’il pleuvait. C’était vraiment le bon temps… selon vous ? Et j’oublie certainement d’autres festivités qui n’ont pas manqué de vous réjouir. »
Pierre Chevalier redevient sérieux : « Quel agriculteur ayant connu tous ces travaux peut les regretter ? En tout cas, je n’ai pas connu « les centenaires en bonnes santé » (évoqués par un lecteur, dans un courrier publié par La France Agricole il y a quelques semaines, ndlr), mais plutôt des personnes usées avant l’âge, avec des déformations de colonne vertébrale suite à des conditions de travail très pénibles.
Et l’agriculteur de nous « (inviter) sur (son) exploitation pour être au contact de la réalité. Et, pour être en accord avec (nos) idées (d’urbains donneurs de leçons, ndlr), (il nous) suggère de venir (…) à pied, voire à bicyclette… » A bon entendeur !
Montagnard je suis.
J’ai connu l’époque de mon grand-père, quand il fallait faire les foins en été, en montagne sous une chaleur écrasante. Ramener des ballots de 50 à 80 kg vers la grange d’alpage… à 1 h de marche ou dans des pentes à 10 ou 20 ° !!!
Quand il fallait en automne aller en forêt ramasser les feuilles mortes pour faire la litière des vaches… Et oui, en montagne pas de paille ou si peu…
Quand il fallait en hiver, marcher 3-4 ou 5 heures dans une neige épaisse, par tout les temps, pour aller chercher le foin de montagne et le redescendre à l’étable sur une espèce de luge… chargée de plus de 200 kg au risque de se tuer dans un ravin ou un arbre… (maintenant on a fait des « compétitions » pour amuser les touristes !!!).
Quand il fallait refaire les chemins car les vaches avaient tout défoncer lors de la montée / descente des alpages… (bon, maintenant on le fait toujours, mais se sont les chasseurs qui s’en occupent !!!)
Quand il fallait passer des heures les pieds dans la tourbe pour faire des briquettes pour chauffer le refuge…
Quand il fallait sous la pluie, partir chercher le veau qui s’était égarer…
Oui, c’était le « bon vieux » temps… Mon grand-père est mort à 65 ans d’un arrêt cardiaque en plein repas….
À vous entendre raconter de cette manière les difficultés rencontrées par l agriculeur de nos jours j’ai bien peur de l avenir de ma fille qui terminera ses études d ingénieur agronome l année prochaine
Bonjour, aucune crainte a avoir. Je suis moi meme ingé agronome et on vis bien. Le plus dur c’est de voir la détresse de nos agris