Dans La France Agricole du 17 mai 2019, André Gallais, professeur honoraire de génétique et d’amélioration des plantes, membre de l’Académie d’agriculture, rappelle que « sur le plan génétique, (…) compte tenu de son mode d’obtention, (le blé Renan) pouvait être considéré comme un organisme génétiquement modifié ». En effet, justifie l’homme de science, un OGM est « un organisme dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement ».
Les bios s’arrangent avec la réalité
De quoi faire hurler le lobby bio sachant que Renan et ses descendants sont largement utilisés en agriculture biologique. Dans un article récemment publié par Inf’OGM, Frédéric Prat prétend que Renan a été obtenu de façon naturelle et n’est pas un OGM relevant de la directive européenne 2001/18/UE. Mais pour André Gallais, « cette conclusion n’est pas si évidente que cela ». En effet, selon la directive évoquée, un OGM est « un organisme, à l’exception des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle ». Or « Renan a bien été obtenu d’une manière qui ne se fait pas naturellement… »
Réponses aux objections
Si « l’induction polyploïde par traitement à la colchicine est certes dans les techniques considérées comme ne conduisant pas à un OGM », « on peut se demander si elle recouvre bien l’utilisation faite, à savoir la restauration de la fertilité d’un hybride interspécifique stérile qui conduit en fait à une nouvelle espèce, fabriquée par l’homme, donc pas très naturelle », argumente le professeur. « De plus, le processus d’obtention de cet hybride avec doublement chromosomique n’est probablement pas équivalent à ce qui se passe dans la nature, avec la fusion des gamètes non-réduits », continue-t-il. Enfin, « quelque soit son mode d’obtention, l’espèce ‘synthétique’ résultant de l’hybridation blé dur x Aegilops ne s’est jamais produite dans la nature, ou n’a pas été observée ».
Renan est bien un OGM
Conclusion, « le résultat de la méthode utilisée est le transfert d’un gène d’une espèce avec laquelle le blé tendre ne se croise pas naturellement » et « il y a bien eu franchissement des barrières naturelles de la reproduction ». « Sans la mise en oeuvre de techniques relevant du génie génétique au sens large, Renan n’aurait pas pu être réalisé » résume André Gallais pour qui « au sens de la première partie de la définition d’un OGM de la directive 2001/18, Renan peut être considéré comme un OGM ». « Du point de vue génétique, il s’agit bien d’un organisme obtenu par des moyens artificiels, nettement plus sophistiqués que ceux employés dans la sélection conventionnelle à l’intérieur d’une même espèce. » Ne comptez pas sur les entreprises bios pour le dire à leurs aficionados ! Vous voilà libres de le faire à leur place… 😉
Cela dit il y a aussi des croisements interspécifiques naturellement : ainsi le blé dur ( génôme AABB) est le résultat d’un croisement d’une plante ayant un génôme AA et d’une plante ayant un génôme BB: l’hybride AB subissant un doublement de ses chromosomes devient AABB, donc fertile . De même pour le blé tendre AABB*DD a donné AABBDD avec le même processus). La nature est donc aussi capable de réussir des croisements entre espèces différentes. Le cas de Renan est plus ciblé car seuls les gènes d’Aegilops intéressants ont été retenus. Renan est clairement le résultat d’une introgression génétique interspécifique, c’est donc bien un OGM.
Juste une petite précision :
ni le blé dur (AABB), ni le blé tendre ne sont des hybrides.
On a à faire avec ces céréales à une génétique d’addition de génomes provenant de graminées sauvages. En gros des SUPER OGM naturels.
Pour le blé dur, c’est l’addition complète du génome de Triticum monococcum ou Petit épeautre (AA 2n = 14 chromosomes ) avec le génome d’Aegilops speltoïdes (BB 2n = 14) qui a abouti au blé dur (Triticum durum AABB 2n = 28)
Pour le blé tendre, c’est l’addition du génome du blé dur avec celui d’un autre aegilops (aegilops squarrosa DD 2n = 14) qui a donné naissance à triticum aestivum puis triticum vulgare à l’origine de toutes nos variétés anciennes et actuelles de blé tendre (AABBDD 2n = 42)
Les triticales octoploïdes (AABBDDRR 2n = 56) actuellement cultivés sont aussi des lignées d’addition provenant de triticum vulgare (AABBDD 2n = 42) avec le seigle (Secale RR 2n = 14)
Il faudrait demander aux donneurs de leçons de définir les Organismes Génétiquement Originels …
@Un physicien
« Il faudrait demander aux donneurs de leçons de définir les Organismes Génétiquement Originels … »
>>> Bonne chance! Vous n’êtes pas près de tenir la réponse! Ou alors et certainement plus que probablement, vous allez en recevoir des poignées toutes plus farfelues ou erronées les unes que les autres!!
Je pense en effet que c’est impossible, la notion d’OGO n’ pas de sens. En corollaire, celle d’OGM n’a pas vraiment de sens non plus.
« En corollaire, celle d’OGM n’a pas vraiment de sens non plus »
Je ne comprend pas très bien là ???
Les plantes résistantes au glyphosate ont reçu un gène de l’EPSP synthase provenant d’une bactérie. Ce gène diffère, si mes souvenirs sont exacts, par deux paires de bases. D »où l’idée ancienne que les mauvaises herbes ne pourraient pas contourner l’herbicide, une double mutation étant improbable… et pourtant…
Aujourd’hui, on peut conférer cette résistance en trois coups de cuillère à pot, en quelque sorte, avec les NBT.
Différence entre OGM HT, « OGM caché » produit avec CRISPR/cas, mutant naturel, mutant induit ? Pas grand chose…
D’accord, les Bt resterons toujours des « OGM »
@Bebop 76
OK, et pour Renan c’est Aegilops ventricosa qui a été utilisé ( ce dernier a d’abord été croisé avec du blé dur). Comme quoi la transgénèse ne fait pas toujours peur aux bios.