Y a-t-il de bons lobbys ? Le lobby peut-il devenir vertueux ? Autant de questions sur lesquelles se sont penchés les invités du débat de midi, l’émission de France Inter qui s’intéresse aux grandes questions comme aux petits débats. Sujet du jour donc, les lobbys et un biais journaliste qui se fait déjà sentir puisque les lobbys seraient fondamentalement non vertueux, voire mauvais. Pourtant, les intervenants venus d’horizon divers ont donné lieu à un débat plutôt équilibré où chacun a pu exprimer son point de vue.
Celui de Nadine Lauverjat, Déléguée générale de Générations Futures, est particulièrement éclairant pour comprendre la logique dans laquelle s’inscrivent les ONG écologistes. Pour répondre aux questions introductives, la représentante de Générations Futures estime que les lobbys sont des groupes qui défendent des intérêts. Comme son ONG ? Non, car elle représente l’intérêt général selon ses dires et non pas les intérêts d’entreprises privées. Le mot tabou est sur la table. Le privé représente le mal absolu. C’est bien connu, les producteurs bio, adulés par Générations Futures, sont de simples kolkhoziens qui n’ont pas pour objectif de vivre de leur activité et encore moins de générer du profit…
Ce découpage manichéen est caricatural, mais permet de comprendre la pensée même des écologistes. Ils pensent représenter l’intérêt général et c’est pourquoi ils peuvent exiger de tous comment manger, vivre et penser. Cette distorsion de la réalité explique la plainte exprimée à plusieurs reprises par Nadine Lauverjat. Les (méchants) lobbys ont beaucoup plus d’argent que les associations écolos, ce qui rend le combat complètement inégal. Oui, les associations ont souvent moins d’assise financière, c’est peut-être normal étant donné qu’elles ne représentent qu’une minorité, certes active, mais une petite minorité. En quoi l’agriculture bio qui ne représente que 10 % des surfaces agricoles utiles devrait-elle avoir le même poids que l’agriculture conventionnelle ?
Que comprendre du positionnement de Générations Futures, une association dont le budget est déjà conséquent avec environ 450 000 euros par an, selon Nadine Lauverjat, et dont les gros financeurs sont… des entreprises privées ? Les distributeurs Bioccop et Botanic ou encore les marques alimentaires Bjorg et Bonneterre ont été ou sont encore au cœur de la machinerie Générations Futures. Si c’est une question d’image pour ces marques, c’est surtout un moyen d’avoir un lobbyste en chef qui va promouvoir les bio dans les médias sous couvert de défendre l’intérêt général. La manœuvre n’est pas nouvelle, mais il ne faut surtout pas le dire et réfuter le fait qu’il y aurait des « soi-disant lobbys bios ».
Cet obstacle effacé comme par enchantement par Nadine Lauverjat lui permet d’enchainer le plus naturellement du monde sur un autre biais cognitif typique des ONG. Le pantouflage permettrait aux lobbyistes d’avoir la main sur les centres de décision. La preuve, l’ancienne cheffe de cabinet du tout nouveau ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a rejoint une association professionnelle (non, il faut dire un lobby !) spécialisée dans les produits phytosanitaires (non, il faut dire les pesticides !). Doit-on interdire à tous ceux qui ont travaillé dans un secteur d’en changer surtout quand ils n’avaient aucun pouvoir de décision ? La liberté est à géométrie variable, car quand un Nicolas Hulot arrive au ministère de l’Ecologie après des décennies de lobbying associatif, il n’y a rien à y redire. Il faut juste s’en féliciter !
Les lobbys écologistes ne sont pas à une contradiction près. C’est bien pour ça qu’ils peuvent encore et toujours sermonner le monde entier…
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