Le financement du lobby vert

Le cas de la Fondation pour le progrès de l’homme

Toutes les fondations philanthropiques ne sont pas nécessairement liées à des multinationales ou au monde des affaires. C’est le cas notamment de la Fondation pour le progrès de l’homme (FPH), une fondation de droit suisse dirigée par le Français Pierre Calame et dont l’argent provient de la fortune d’un riche chimiste, Charles-Léopold Mayer. Le capital de la FPH représente en 2006 plus de 200 millions d’euros et est composé à 80 % d’un capital mobilier (placé en obligations et en actions) et à 20 % de biens immobiliers en Suisse et en France. Le joyau de la FPH est sans aucun doute le très chic Domaine de Villarceaux, dont la famille Calame est propriétaire. Celui-ci comprend un château, un golf et une exploitation agricole de plus de 400 ha – la ferme de la Bergerie – convertie en bio en 1997 et gérée par Matthieu Calame, le fils du président et l’un des responsables de programmes à la fondation. Contrairement aux fondations anglo-saxonnes, la FPH se targue d’appliquer une éthique dans le choix de ses placements financiers. Elle est même le partenaire de l’Observatoire de la Finance, dont elle a soutenu la création au début des années 90 pour « sensibiliser les milieux financiers à la recherche du bien commun »

Toutefois, à l’instar de ses consœurs anglo-saxonnes, la FPH joue un rôle important dans l’émergence de certaines ONG comme par exemple Inf’OGM, une association anti-OGM créée en 1999 à l’initiative de la FPH et de différents groupes comme Greenpeace, les Amis de la Terre et la Confédération paysanne. Sans l’aide financière de la FPH, Inf’OGM aurait de grosses difficultés à poursuivre ses activités. A titre indicatif, Inf’OGM est le partenaire unique de la FPH dans un programme piloté par Matthieu Calame avec un budget de 100.000 euros et dont le thème est « Réintroduire les choix scientifiques et techniques dans le champ de la démocratie ». De même, les recettes de la Fondation sciences citoyennes (FSC), dirigée par Jacques Testart, dépend entre 65 et 90 % de la FPH. D’autres associations impliquées dans une bataille contre l’agriculture conventionnelle, comme BEDE, Réseau Semences Paysannes et Geyser, reçoivent aussi régulièrement des aides de la FPH. Rappelons également que le voyage de José Bové à Seattle en 1999 a été organisé par Pierre Vuarin, le responsable des questions agricoles à la FPH.

De plus, la FPH partage depuis longtemps une même préoccupation que certaines grandes fondations anglo-américaines : la gouvernance mondiale. Elle a d’ailleurs créé début 2006, en partenariat avec entre autres la Ford Foundation, l’Institut de recherche et débat sur la gouvernance qui vise à réfléchir sur de nouvelles régulations des sociétés humaines. Dans cette optique, il ne s’agirait plus simplement d’aider les ONG – la société civile – pour réaliser certains projets concrets mais d’en faire des acteurs clefs de cette nouvelle gouvernance mondiale.