Nourrir le monde sans élevage ? Juste impossible, surtout si l’utilisation des phytos baisse

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Pour nourrir 10 milliards d’humains, la FAO (Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) préconise une augmentation de la production alimentaire mondiale de 50 à 70%, et moins de gaspillages bien sûr. « Pour cela, l’agriculture intensive, souvent critiquée pour ses effets sur l’environnement, restera irremplaçable », explique Léon Guéguen, directeur de recherches honoraire de l’Inra et membre émérite de l’Académie d’Agriculture, dans un courrier à La France Agricole du 31 mai 2019. « Elle seule permettra des rendements élevés et donc une plus forte production sans augmentation des surfaces cultivées, notamment par déforestation, dont les conséquences écologiques seraient bien pires » continue-t-il. Un point déjà abordé sur Alerte-Environnement.fr (ici par exemple). Les produits phytos de synthèse sont indispensables à l’agriculture intensive, leur interdiction conduisant « à des rendements plus faibles de 20 à 50% (cas du blé en France), voire des pertes totales de récolte ». Léon Guéguen rappelle aussi que la diminution des rendements entraîne aussi une augmentation du prix des produits (de 30 à 100 % pour les aliments bio) justifiée pour le producteur mais pas pour le consommateur qui n’en retire aucun bénéfice pour sa santé ».

Comment la réduction des phytos rend plus indispensable encore l’élevage intensif

Démonstration, par Léon Guéguen : « Pour les grandes culture, à défaut d’engrais minéraux (généralement produits par synthèse chimique, ndlr), il faut impérativement recourir à des engrais organiques principalement fournis par l’élevage (fumier, purin, lisier, digestat de méthanisation) et notamment par l’élevage intensif sous abri. En effet, la production plus extensive (pâturage ou autre parcours extérieur) ne permet pas la récupération totale des déjections utilisables pour les grandes cultures. Donc si l’on renonce aux engrais minéraux, il n’est pas possible de maintenir à moyen terme la fertilité des sols de grande culture sans accès facile aux engrais organiques fournis par des élevages intensifs à proximité. Mais comment faire en agriculture biologique dont le règlement interdit l’emploi de fumier ou d’excréments provenant d’élevages ‘industriels’ ? »

La conclusion du chercheur est sans appel : « Les productions animales, même en élevage intensif, resteront indispensables, non seulement pour répondre à la demande croissante des pays émergents, mais aussi, à défaut d’engrais minéraux, pour la production d’engrais organiques pour les grandes cultures. » En résumé : phytos ou élevage intensif, il faut choisir si nous voulons nourrir tous les humains sur Terre.