Green Deal, stratégie Farm to Fork, règlement européen sur les produits phytosanitaires, la feuille de route de la Commission européenne est claire : en imposant une diminution de moitié de l’usage des produits phytosanitaires, il s’agit d’imposer « une cure de décroissance » à notre agriculture européenne, jadis parmi les plus puissantes au monde
Pas étonnant qu’un vent de fronde souffle au sein du Parlement européen et parmi les Etats membres de l’UE. Le 26 septembre dernier, une vingtaine de ministres de l’Agriculture ont demandé à la Commission européenne de préparer une nouvelle étude de l’impact du règlement sur « l’utilisation durable des pesticides » avant de poursuivre les discussions sur ce texte. En pointe dans les débats, la Pologne estime que « l’impact de toutes les mesures et restrictions possibles doit être dûment évalué » d’autant que « la hausse des importations dans l’UE compte tenu de la baisse de production agricole à prévoir ne sont pas non plus prises en considération ».
Et on les comprend : des centaines de molécules ont été retirées du marché au cours des dernières années rendant le travail des professionnels de plus en plus compliqué. Certaines filières se retrouvent sans aucune solution pour lutter contre les ravageurs. Les solutions de biocontrôle, tant vantées par la Commission européenne, sont déjà largement mises en pratique par les producteurs bio et conventionnels, mais ne peuvent pas remplacer la « protection phytosanitaire ». Prévoyant peut-être cette fronde, la Commission européenne brandit depuis des mois l’argument NBT. Les NBT, la solution miracle ?
Les NBT : une solution possible mais pas dans l’immédiat
Les News Breeding Techniques (NBT) sont des techniques de modification génétique d’un organisme non pas en introduisant une partie de code génétique étranger, mais en « éditant » l’ADN même de l’organisme. Parmi ces techniques, celle des « ciseaux moléculaires » est la plus connue, sa mise au point étant notamment due à une chercheuse française, Emmanuelle Charpentier qui a obtenu le prix Nobel de chimie récemment. En d’autres termes, une partie (très minime) de l’ ADN d’une plante peut être inactivée ou modifiée afin de la rendre plus résistante à certaines maladies ou à des conditions climatiques plus extrêmes. Un technique prometteuse née il y a dix ans et sur laquelle compte la Commission européenne.
Il existe pourtant deux écueils de taille. Les NBT vont demander de nombreuses années avant de concerner une majorité de productions. Cette technique est relativement nouvelle et demande encore beaucoup de travail afin de proposer aux consommateurs les bonnes variétés. Quand on pense par exemple qu’il a fallu quasiment 50 ans pour que la variété de pommes Pink Lady (non OGM) rencontre son succès auprès des consommateurs, on peut douter qu’une nouvelle variété de pomme, obtenue par NBT résistante à la tavelure ou au mildiou soit « acceptée » en quelques années. En clair, ce calendrier ne correspond pas à celui de la diminution drastique de l’usage des produits phytosanitaires (2030 pour rappel). Autre obstacle important : l’opposition farouche des ONG écologistes aux NBT, celles-ci ne jurant que par le « naturel ». Oubliant très vite que les huiles de tournesol oléiques ou encore des riz de Camargue sont issus de techniques de mutagénèse et sont donc des OGM selon la réglementation européenne actuelle.
La Commission européenne se montre donc particulièrement optimiste, si ce n’est naïve quant à un « remplacement » des produits phytosanitaires par les NBT. Ces dernières constituent des solutions complémentaires utiles à développer. Elles viendront compléter l’arsenal à disposition des agriculteurs aux côtés des techniques de biocontrôle et des produits phytosanitaires. Prétendre que les NBT sont la solution unique ferait presque passer la Commission européenne pour un marchand de tapis. Troquer les produits phytosanitaires par les NBT est une fiction.
Cela ressemble à s’y méprendre à la lubie de l’hydrogène qui vise à remplacer les énergies fossiles.
Les obstacles techniques sont tels que cela prendra des années pour les solutionner, si jamais on y arrive.
Par contre, les montagnes de pognon qui se déversent vers cette filière créent un effet d’aubaine qui donnera l’illusion qu’on y arrivera vite.
Les NBT sont maintenant brandis par les politiques (la Commission entre autre) comme la solution à tous leurs délires: ça montre néanmoins qu’ils réalisent qu’ils ont mis la charrue avant les bœufs mais sans oser l’avouer.
J’ai du mal à voir les NBT venir au secours des agriculteurs dans la lutte contre les mauvaises herbes et les insectes.
Mais je ne vois pas non plus la Commission européenne brandir depuis des mois l’argument NBT. A part le commissaire à l’agriculture Janusz Wojciechowski tenu de répondre aux ministres de l’agriculture et aux milieux agricoles, avec un discours ambivalent, je ne vois aucun commissaire monter au front.
Il est certes question de réviser les règles relatives aux autorisations, mais le programme de travail s’appelle à l’évidence « procrastination ».
Je rappelle aussi que l’agriculture en général a été absente du discours sur l’état de l’Union d’Ursula von der Leyen.
Cela m’étonnait aussi que l’UE mette en avant une solution qui amène à ce projeter dans l’avenir. Ce n’est pas le genre de la maison, qui préfère plutôt les retour en arrière en matière agricole.