Sur le site flambant neuf de Générations Futures, on trouve une nouvelle rubrique baptisée « idées reçues ». L’une d’elle est : « L’AB utilise aussi des pesticides, parfois dangereux, et même des pesticides de synthèse ! » On peut y lire : « Attention toutefois, il est vrai que certains pesticides dits « naturels » / « bios » peuvent être dangereux pour la santé, c’est le cas notamment de la Roténone qui est un neurotoxique puissant (lié à la survenue de la Maladie de Parkinson) – c’est d’ailleurs pourquoi celle-ci est désormais interdite en bio. Très souvent les lobbies des pesticides se focaliseront sur ce produit spécifiquement car finalement ils ont peu d’angles pour attaquer la bio qui nuit au développement de leur marché. Mais quoi qu’il en soit il y a bien plus de pesticides chimiques de synthèse qui posent problème d’un point de vue sanitaire (voir notre dossier et question ci-dessous) et environnemental, il y a beaucoup moins de sorte de pesticides bio et les tonnages sont sans égal comparés aux pesticides de synthèse. »
Concernant cette dernière remarque, il est vrai que le tonnage des pesticides bios est moindre que celui des pesticides de synthèse, mais il représente quand même 22% du tonnage total (13.900 tonnes en 2011, contre 48.800 tonnes pour les pesticides de synthèse), alors que les surfaces conduites en bio représentaient fin 2011 à peine 3,5% de la surface agricole de France. Alors, il est vrai qu’il arrive que les agriculteurs conventionnels utilisent aussi des pesticides bios, mais imaginez si demain l’agriculture française devenait 100% bio, comme le souhaite François Veillerette, le tonnage de pesticides bios monterait forcément en flèche.
De plus, il est surprenant que le seul exemple de pesticide bio dangereux cité par Générations Futures soit celui de la Roténone, un produit aujourd’hui interdit. Or quand on regarde attentivement le Guide des intrants utilisables en agriculture biologique en France (22 juin 2011), on se rend compte que sur les 349 spécialités autorisées en bio (agriculture + jardin), 97 spécialités sont classées « Risque de Toxicologie-N-dangereux pour l’environnement », 87 sont classées « Très toxique pour les organismes aquatiques, peut entraîner des effets néfastes à long terme pour l’environnement aquatique », 23 spécialités sont classées « Dangereux pour les abeilles » et 3 spécialités sont classées « Nocif : peut provoquer une atteinte des poumons en cas d’ingestion ».
On se demande évidemment pourquoi François Veillerette n’exige pas l’interdiction de tous ces produits dangereux… En fait, la raison en est simple : l’agriculture bio ne peut se passer de pesticides ! En reprenant une expression des écologistes, on peut dire que l’agriculture bio est « accroc » aux pesticides. Vous en doutez ? C’est pourtant ce qu’affirme Jean-Luc Juthier, arboriculteur bio (par ailleurs Faucheur Volontaire et membre de la Confédération paysanne). Pour lui, il est impossible de faire son boulot correctement sans utiliser notamment de l’huile de neem, un insecticide interdit pour l’instant en France. Il explique ainsi à des collègues : « Il apparaît que pour la grande majorité d’entre nous, l’utilisation de la BSC (bouillie sulfo-cacique) et de l’extrait de neem restent incontournables pour produire des pommes dans des conditions qui permettent d’en vivre. » Il ajoute : « Bien sûr que l’idéal pour produire des fruits bio, ce serait de n’utiliser que des substances naturelles que l’on a sous la main et que la nature nous offre. (…) Mais en attendant, si l’on a comme objectif de vivre de son travail, tout en respectant la terre, nos consommateurs, et tout ce qui nous entoure, il faut bien reconnaître que pour avoir une production suffisante et régulière, condition indispensable pour en vivre, on est bien obligés de passer actuellement par l’utilisation du neem, de la BSC, de l’argile, etc… ou de tout cela à la fois. » Or l’huile de neem n’est pas sans effet anodin, et Jean-Luc Juthier le sait pertinemment bien. Il reprend notamment un commentaire de Jean Sabench, spécialiste « abeilles » à la Conf » : « L‘huile de neem a des effets sublétaux sur l’abeille, en particulier par ses propriétés larvicides dues à son action endocrinienne chez les insectes. Il semble donc prudent de préconiser une utilisation hors floraison et hors présence d’abeilles. » Le fait que l’huile de neem puisse être dangereuse n’ébranle pas Jean-Luc Juthier, car il est convaincu de ne pas pouvoir produire correctement sans elle. En mars 2011, quand l’EFSA donne un avis favorable à l’azadiractine, la substance active de l’huile de neem, pour la pomme de terre, Jean-Luc Juthier se réjouit en déclarant à ses collègues : « L’azadirachtine est classée N (dangereuse pour l’environnement) R50/53, R51/53 très toxique pour les organismes aquatiques, et pouvant avoir des effets à long terme. Maintenant, il faut attendre une demande d’AMM en France sur un produit commercial et pour une utilisation donnée. Sur le plan strictement légal, ça ne change rien pour l’instant : on ne peut toujours pas légalement l’utiliser Jusqu’à présent, c’était la dangerosité de l’azadiractine qui était mise en avant. Cet argument tombe donc, et c’est plutôt une avancée. » Autrement dit, le classement « très toxique pour les organismes aquatiques, et pouvant avoir des effets à long terme » n’interpelle pas du tout l’arboriculteur bio, et parle même « d’avancée » !
Il serait peut-être temps que l’on mette fin au mythe d’une agriculture bio sans pesticides ou sans pesticides dangereux.
Sources
http://www.generations-futures.fr/sinformer/idees-recues/#.UKynxYaxqFU
http://www.uipp.org/content/download/1514/10572/file/Mag_RA%20UIPP%202012_Final.pdf
http://www.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/111012_GUIDE_INTRANTS.pdf
http://fr.groups.yahoo.com/group/arbo-bio-info/message/4491
http://fr.dir.groups.yahoo.com/group/arbo-bio-info/message/5451
http://fr.dir.groups.yahoo.com/group/arbo-bio-info/message/4591
http://fr.dir.groups.yahoo.com/group/arbo-bio-info/message/5132
Un mensonge de plus des environnementeurs, escrologistes, bionimenteurs dévoilé. Un, mais un vraiment gros !
Aucune agriculture ne peut se passer de pesticides, même le push-pull des agroécologues onusiens résulte de la production d’un répulsif chimique.
Un lien pour la source sur le tonnage des pesticides bio ?
Les principaux produits utilisés en bio sont le sulfate de cuivre et le soufre, comme ils sont pondéreux, cela correspond effectivement à 16 000 tonnes pour 56 000 tonnes environ de produits plus élaborés issus de la chimie de synthèse en agriculture conventionnelle. Ils sont distribués comme l’ensemble des pesticides essentiellement par des entreprises adhérant à l’UIPP, site sur lequel on trouve les chiffres de consommation en France.
Soufre et sulfate de cuivre sont utilisés aussi en agriculture conventionnelle mais de façon marginale par rapport au bio par unité de surface.
Vous oublié aussi le spinosad, insecticide bio très dangereux pour les abeilles et la faune aquatique.
Ce bio là, je n’en veux pas et je me suis dirigé vers « biocohérence ».